Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

 

 

 

Rechercher

16 octobre 2008 4 16 /10 /octobre /2008 18:04
14 octobre 2008
Franck Saragba
Source: l'Indépendant

Guerre révolutionnaire, guerre subversive, ou encore guerre contre-insurrectionnelle ne sont-elles pas que les avatars d’une seule et même guerre ? Celle de la guerre dite « totale » et frontale dont les origines se confondent avec l’histoire d’une humanité intrinsèquement autodestructive à présent post-chaotique. 
 
Contrairement aux schémas plus classiques de la guerre totale , plus ou moins élaborées, faites de déclaration et d’annonce d’une entrée officielle en guerre contre un autre état dont les terribles dernières manifestations eurent lieu en 1914 et 1940, la guerre révolutionnaire transposée et menée en terre centrafricaine par l’ex puissance colonisatrice avec la complicité et le silence des organisations « internationales » n’est pas d’une autre nature mais d’une tout autre pratique en ce sens que l’appellation du mot guerre est complètement bannie au bénéfice d’un verbiage lénifiant et codifié à la finalité aussi destructrice. Tantôt, elle est déguisée par des mots aussi soporifiques que la coopération, le développement équitable, le développement durable, le Co-développement par lesquels se nourrissent une multitude et un envahissant répertoire d’Organisations non gouvernementales aux pensées nocives, aux relents expansionnistes.

Une immersion dans l’histoire des stratégies nous enseigne que la guerre révolutionnaire n’est autre chose qu’une des branches de l’art de la guerre subversive théorisé par le penseur chinois SUN TZU au VIème siècle avant J.C puis repris par des stratèges aussi renommés que Machiavel, Clausewitz ou Mao. L’essentiel de cette pensée nous-dit on, réside dans le fait de combattre ou de lutter sans front ni champ de bataille, le but est la conquête des esprits plutôt que celle des territoires.

Rappelons-nous qu’après le morcellement de l’Afrique pour l’affaiblir et l’accession inattendue de ces états à l’indépendance, il fallait coûte que coûte par une politique d’influence au travers d’une diplomatie de masse, préserver les rapports de force entre l’ancienne puissance colonisatrice et les états nouvellement indépendants. La théorie de Mao Tse Toung sur le principe de la supériorité selon laquelle face à un ennemi en nombre, il fallait le manipuler et le diviser pour le vaincre « morceau par morceau » en concentrant au niveau tactique une force très supérieure.

La République centrafricaine n’est-elle pas le reflet et le plus bel exemple de cette théorie ? Les principaux leaders politiques centrafricains clament partout qu’ils aiment leur pays et leur population mais sont incapables de ravaler leur haine et de travailler tous ensemble pour l’intérêt général. Ils disent aimer la démocratie et prétendent être des démocrates dans l’âme mais n’hésitent pas à faire des coups d’états ou à lever des rebellions, voilà la contradiction.

Pire encore, ils refusent le dialogue alors qu’il est l’expression la plus simple de la démocratie. Ils disent aimer la justice mais c’est surtout pour l’appliquer aux autres. Leur vraie nature apparait dés lors qu’on leur demande d’appliquer le sens patriotique tant réclamé, les devoirs du citoyen, les règles fondamentales de la démocratie ou encore des notions d’éthique, de déontologie, de responsabilité.

Ainsi le substrat de la guerre révolutionnaire selon lequel, elle se nourrit de la contradiction interne d’une population donnée comme celle de la République centrafricaine se réalise.

Elle se réalise d’autant plus que les contradictions sont flagrantes dans les actes posés par les principaux hommes politiques, ses intellectuels et autres élites centrafricaines depuis l’accession du pays à l’indépendance. Sous l’œil amusé et satisfait des instigateurs, la guerre révolutionnaire en Centrafrique fait son petit bonhomme de chemin d’autant plus qu’elle est prise en main par certains hommes politiques centrafricains assoiffés de pouvoir pour en assurer la pérennité.

Planifiée et sournoise, elle découle des expériences tirées de la guerre totale par l’échec de l’armée française pourtant supérieure en armes pendant la guerre d’Indochine face aux vietminh rusé qui avait déjà compris et menait le combat selon les principes de la guerre révolutionnaire. Cette expérience à servi en 1954 à combattre en partie le FLN (Front de libération national algérien) en le privant de sa base populaire et en ralliant les populations arabes du côté de la France.

Plus-tard, ce savoir-faire français en matière de « guerre révolutionnaire » appliqué pendant la guerre d’Algérie, a été exporté toutefois avec quelques variantes pour une simple question d’adaptabilité au terrain en Amérique latine par des conseillers français, en Afrique francophone et plus particulièrement en République centrafricaine terre de toutes les expérimentations.

Ainsi, des experts attitrés tantôt au titre de la coopération, du développement équitable, du co-développement etc.… s’attèlent à une mise en œuvre systématique et systémique de tous ordres destinés à influencer l’attitude de la population centrafricaine aux travers de ces institutions. Cette stratégie qui vise naturellement à exploiter les nombreuses contradictions internes existant chez le Centrafricain afin de s’assurer le contrôle de sa population, par conséquent à faire main basse sur le pays pour s’accaparer de ses innombrables minerais et matériaux stratégiques comme l’uranium qui vient d’être bradé à AREVA, le diamant et sûrement le pétrole si l’on venait à l’exploiter.

Au cœur du processus de la guerre révolutionnaire l’appareil étatique avec toujours l’imposition à la présidence d’un homme dont la notoriété est égale à zéro par conséquent isolé et capable de pouvoir diviser ou plutôt incapable de pouvoir rassembler. Il est doté d’une « administration » vidée da sa mission première et d’une armée « nationale » humiliée et frustrée d’autant plus qu’elle manque cruellement de moyen au désavantage d’une armée parallèle que sont les éléments de la garde présidentielle et les milices dotés de moyens considérables et de liberté d’actions illimitée.

L’organisation de la coercition et l’instigation de la peur par d’anciens libérateurs ou miliciens déçus et reconvertis en bandits de grand chemin (braquages, kidnapping, arrestations arbitraires, actes de barbarie…) qui jouent un rôle-clé apparenté à celui des hiérarchies parallèles sur le modèle des organisations révolutionnaires clandestines, politique de la terre brûlée comme en situation de guérilla, guerre psychologique d’où fuites et désertions des villageois et multiplication de refugiés dans le Nord et l’Est du pays.

Aussi, l'utilisation du renseignement par des moyens peu conventionnels comme par exemple l’établissement des fameuses listes noires, la torture dans la fameuse prison délocalisée de Bossembélé, de la guerre psychologique comme l’arrestation récemment arbitraire du président de la ligue centrafricaine des droits de l’homme, du quadrillage par une partie de l’armée régulière ou des milices dont l’objectif est de répandre la terreur. Pour lutter contre une insurrection, la garde présidentielle et les milices jouissent des pouvoirs et des missions de police exemptées de tout cadre judiciaire.

La guerre révolutionnaire a été mise en place pour verrouiller les indépendances et repose sur des accords de défense secrets, un modèle constitutionnel sur mesure dotant le président de pouvoirs exceptionnels en cas de crise, la formation de gendarmes dans le cadre d’une coopération technique pour assurer le maintien de l’ordre, ainsi que la présence de « conseillers » juridiques et militaires pour garder le contrôle de l’exécutif des nouveaux États.

L’imprégnation doctrinale d’officiers supérieurs centrafricains qui auront fait un bref séjour à l’école de guerre encadrés par une poignée de spécialistes discrets qui forment et prennent part à une assistance opérationnelle lors des combats comme à Birao, comme à Tirigounlou. Sans installation officielle, ils recyclent des unités de l’armée gouvernementale dans des centres d’entrainements.

Ainsi, la boucle est bouclée dès lors que la guerre stratégique qui se nourrit de la contradiction interne de la population centrafricaine, des incohérences de ses hommes politiques et dont l’objectif premier est l’appropriation de l’esprit, finit par utiliser les propres fils et filles du pays pour assurer d’une manière presque naturelle la continuité.

Partager cet article
Repost0

commentaires

Textes De Juliette