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2 février 2010 2 02 /02 /février /2010 00:53

29 janvier 2010
Camer.be


Ange Félix Patassé: "Comment le groupe Fotso et Bozizé ont détourné mon argent"

L’ancien chef d’Etat centrafricain, M. Ange Félix Patassé ne fait aucune économie de révélations accablantes sur la multinationale camerounaise et l’actuel homme fort de Bangui, M. François Bozizé, dans le scandale des milliards qu’il affirme avoir déposé dans les caisses de la Commercial Bank Centrafrique (Cbca) après son renversement en mars 2003.

A 73 ans, cet ingénieur agronome, qui revient d’un « exil formateur » de 7 ans, selon ses propres mots, après une première expérience présidentielle de 10 ans brutalement interrompue par un coup d’Etat, se délecte déjà de l’idée d’un retour gagnant au pouvoir à Bangui, et y travaille. Le contexte s’y prête : nous sommes à trois mois du premier tour du scrutin présidentiel prévu le 18 avril 2010. « L’envoyé du Seigneur pour sauver mon peuple», qui se défend d’avoir été exclu de son parti, le Mouvement de libération du peuple centrafricain (Mlpc), qui a préféré investir l’ancien Premier ministre Martin Ziguélé, distribue des piques et assène des coups.

Morceaux choisis: « Martin Ziguélé a escroqué des chefs d’Etat à mon nom… », « Bozizé n’est qu’une marionnette…» Particulièrement incisif, M. Ange Félix Patassé, qui sait attaquer pour se défendre, ne mâche pas non plus ses mots sur l’affaire Jean-Pierre Mbemba, et ses rapports avec le chef de l’Etat camerounais, M. Paul Biya.

Comment vous sentez-vous au bout de 7 ans d’éloignement de votre pays ?

Je me porte très bien ! Il ne pourrait en être autrement maintenant que j’ai retrouvé la terre de mes ancêtres et le peuple centrafricain.

Ce retour définitif dans votre pays suppose-t-il que vous avez tourné la page du coup d’Etat du général François Bozizé, le 15 mars 2003?

Vous vous rappelez qu’en décembre 2008 s’est tenu le dialogue politique inclusif auquel j’ai pris part, sous l’égide de mon frère, feu le président Omar Bongo Ondimba. Au terme de cette grande palabre, j’avais décidé de tourner la page. Aujourd’hui je suis rentré définitivement pour prendre une part active au programme de développement de mon pays et surtout pour participer à la prochaine élection présidentielle. Des chefs d’Etat d’Afrique et des pays amis m’ont demandé de renter parce que mon pays, la Centrafrique, a besoin de moi, de ma petite expérience pour le sortir de l’impasse actuelle. J’en profite pour rendre un hommage appuyé au peuple centrafricain qui m’a soutenu au-delà des différences et surtout à toute la jeunesse pour sa ferveur et son engouement sans cesse autour de ma personne.

Est-ce que vous avez pardonné?

Bien sûr que j’ai pardonné. Je suis le père de la nation. J’ai pardonné à ceux qui m’ont offensé, à ceux qui m’ont fait du mal. Dieu nous a dit: « A moi la vengeance, à moi la rétribution.» Je tends ma main paternelle à tous les Centrafricains et toutes les Centrafricaines, et d’autre part à tous ceux qui veulent reconstruire le pays.

Pourquoi vos relations avec le général François Bozizé ont-elles dérapé jusqu’à ce niveau?

Mais posez-lui la question! C’est lui qui a commis le coup d’Etat. Et puis, comme je l’ai toujours dit, François Bozizé n’est qu’une marionnette, les vrais auteurs du coup d’Etat sont ailleurs.

Vous voulez parler de qui ?

C’est visible. Remarquez à qui profite le crime. Mais comme le Seigneur a mis sur mes lèvres la repentance, j’invite le peuple centrafricain à un seul mot d’ordre: la repentance! la repentance!

Comment avez-vous vécu votre exil?

L’exil aura été pour moi une formation. Je sors d’un exil formateur. Il y a des positions dont on ne se rend compte que par expérience, fût-elle douloureuse. Dans cette épreuve, je me suis formé spirituellement. Et le Seigneur m’a demandé de pardonner. Je reste dans cette logique de pardon au niveau national.

La Centrafrique est un pays très riche de par les richesses de son sous-sol mais toujours enfoui dans les profondeurs du sous-développement et politiquement instable. Est-ce une malédiction ?

La Centrafrique est effectivement un pays très riche potentiellement. Mais c’est parce que les ténèbres l’ont assailli dès le départ et que les populations n’ont pas été préparées quotidiennement à rentrer en possession de ces potentialités. Et c’est pour moi une mission divine de conduire le peuple sur la voie de la repentance pour que le Seigneur nous accorde ses bénédictions pour la mise en valeur de ces richesses dans un climat de paix, de concorde, de solidarité nationale, de justice sociale, dans un climat de lutte contre la corruption et de détournements.

Voilà les mots qu’il faut imprimer dans les cœurs et l’esprit de tous les Centrafricains pour que règne l’amour et la justice, une justice qui est respectée par le peuple, pour que le pays puisse repartir sur des fondements solides. Et que nous tous, Centrafricains, puissions allés en rangs serrés pour la mise en exploitation de toutes ces richesse dont Dieu nous a comblé. C’est l’objet de ma lutte: que les richesses de ce pays puissent profiter à mon peuple.

Quelle relation entretenez-vous avec le pouvoir en place?

En décembre 2008, lors du dialogue politique inclusif, j’avais déclaré que je reconnaissais François Bozizé comme nouveau chef d’Etat centrafricain, mais qu’en contrepartie, il devait organiser des élections présidentielles dans la sérénité et en toute transparence pour redonner confiance au peuple centrafricain. Bozizé c’est mon frère ! S’il n’organise pas les élections selon les normes, c’est lui qui aura les comptes à rendre à Dieu, ce n’est pas moi.

Vous vous êtes d’abord déclaré candidat aux prochaines élections présidentielles sous la bannière du Mlpc (Mouvement de Libération du Peuple Centrafricain), dont vous êtes le père fondateur. Finalement vous êtes « candidat indépendant ». Pouvons-nous conclure que la rupture est consommée avec votre chapelle politique consacrant en même temps Martin Ziguélé, votre ex-Premier ministre comme candidat du Mlpc?

Le Seigneur est venu me parler par révélation. Le Mlpc, ce parti que Dieu avait suscité en moi en 1962, était un parti de rassemblement de tous les Centrafricains pour la lutte contre le néocolonialisme. Aujourd’hui, ce parti qui faisait la fierté de tous les Centrafricains est sous la dépendance des escrocs. Et c’est pour ça que le Seigneur m’a dit d’aller aux élections en indépendant car le Mlpc a abandonné sa voie originelle pour s’enfoncer dans la voie des ténèbres, de la corruption, du mensonge. Je suis le candidat du peuple centrafricain, de l’unité centrafricaine, pour la promotion de la paix.

D’où vient-il que vous parlez de révélation divine, alors, selon nos informations, les tribunaux de Bangui ont plutôt tranché en faveur Martin Ziguélé comme candidat du Mlpc.

Vous vous trompez, ce n’est pas ça ! Vous avez été mal informé. Le tribunal n’a pas prononcé un jugement sur le fond mais plutôt sur la forme. Et c’est précisément sur le contentieux entre le candidat indépendant que je suis et Martin Ziguélé. Ça n’a rien à voir avec le fondateur du Mlpc. Je suis, je reste et demeure le fondateur du Mlpc dont je jouis de toutes les prérogatives, ce n’est pas le moment d’épiloguer sur ce point. L’affaire, actuellement en suspend à la cours de cassation, n’a pas été tranchée quant au fond. Voilà la vérité.

Martin Ziguélé est en train de truander ce parti. Par exemple la loi prescrit à tout candidat aux élections législatives ou présidentielles l’obligation de tenir un rapport financier général à la Cour des comptes sur l’origine et l’utilisation des fonds à la fin de la campagne électorale. Martin Ziguélé n’a pas encore dressé ce rapport jusqu’aujourd’hui. Et pour cause, lors de la dernière élection présidentielle, prétextant qu’il était envoyé par moi, il avait escroqué des chefs d’entreprises et même certains chefs d’Etat d’Afrique et d’ailleurs.

Voilà une accusation très grave. Vous la confirmez?

Parfaitement! La plupart de ces chefs d’Etat sont mes amis. Et Martin Ziguélé leur avait fait croire qu’il venait de ma part pour qu’ils lui donnent de l’argent. Ce qui est faux ! Je ne lui avais donné aucun accord d’autant plus que je n’étais même pas au courant de ses basses manœuvres.

Quels sont donc ces chefs d’Etat que Martin Ziguélé a escroqué?

Je suis un homme d’Etat. Ne vous imaginez quand même pas que je vais vous donner des noms de chef d’Etat. Martin Ziguélé est allé voir des chefs d’Etat amis qu’il a escroqués en leur mentant que c’est moi qui l’avais envoyé. Ce qui est archifaux. Voyez le coup qu’il avait ourdi à Libreville où on avait prétendu que mon acte de naissance était vide pour éliminer ma candidature. Un document avec lequel j’ai effectué tout mon cursus scolaire et académique couronné par un diplôme d’ingénieur agronome. Il est quand même arrivé à soutenir que l’acte de naissance du président Patassé était illisible.

Votre statut de «candidat indépendant» sonne comme un handicap dans la course pour le fauteuil présidentiel. Qu’en pensez-vous?

Si vous viviez en Centrafrique, vous vous rendriez compte de l’engouement qu’il y a autour de ma personne. C’est dans la ferveur que le peuple centrafricain compte sur moi. Ma candidature indépendante s’appuie sur un consensus national et ne saurait constituer un handicap. Juste un rappel de taille, c’est Patassé qui a porté le Mlpc au pouvoir, ce n’est pas le Mlpc qui a porté Patassé au pouvoir.

Etes-vous déjà en campagne ?

Je suis légaliste et par conséquent je ne suis pas encore en campagne. J’attends le moment opportun pour battre campagne en conformité avec la loi. Je respecte l’ordre constitutionnel, notamment dans ses aspects relatifs à la loi électorale. Pour l’instant, les forces vives centrafricaines, les associations de femmes et de jeunes, les comités de soutien au candidat Patassé sont sur le qui-vive dans tous les coins et recoins du pays.

Vous avez 73 ans. Vous avez dirigé la République centrafricaine pendant 10 ans. Ne pourriez-vous pas vivre sans être à nouveau président de la Centrafrique?

Mais laissez-moi vous retourner la question: pourquoi voulez-vous que je ne me présente plus? Je suis en pleine forme pourtant. Je suis encore jeune pour la fonction présidentielle. Je jouis de toutes mes capacités intellectuelles et physiques et de surcroît mon peuple m’aime. Si vous voyez aujourd’hui l’engouement du peuple centrafricain et plus particulièrement l’engagement de la jeunesse, des universitaires, autour de ma candidature, vous comprendrez qu’il est de mon devoir d’écouter l’appel du peuple, que je suis en mission. Moi je reste jeune, j’ai retrouvé mes 18 ans d’âge.

Une opinion tenace pense que votre candidature pourrait être invalidée par certaines clauses de la loi électorale notamment celle relative à l’obligation de résidence permanente en Centrafrique ces cinq dernières années.

On raconte n’importe quoi ! Patassé ne se reproche rien du tout. J’aime mon pays, je n’ai pas déserté mon pays. Contraint à l’exil, j’ai des entreprises voire des usines qui ont continué à fonctionner en Centrafrique. La grande nouvelle, c’est que la justice centrafricaine vient de décider que tous mes biens qui ont été confisqués ou volés par le pouvoir me soient restitués. Ça voudrait dire que je suis rétabli dans tous mes droits. Ce sont des spéculations. J’invite mes compatriotes, dans ce contexte préélectorale et vu les épisodes difficiles que le pays connaît, à s’appesantir sur des idées qui construisent et non pas demeurer sous le boisseau des spéculations, de la haine, de la division.

Après une première expérience à la tête du pays brutalement interrompue par le coup d’Etat du général François Bozizé le 15 mars 2003, que pouvez-vous proposer de neuf aux Centrafricains?

J’ai un programme politique d’avant-garde qui mettra la Centrafrique résolument et de façon définitive sur les rails vers un horizon de développement économique, politique et social soutenu et à long terme. Il s’étale sur 20 à 30 ans. Il se démarque de la vision à cour terme et le pilotage aveugle en eau trouble que vit aujourd’hui le pays. La Centrafrique est actuellement un grand malade qu’on ne peut pas soigner en 5 ans seulement comme le pensent malheureusement mes concurrents. Ce programme d’avant-garde est le prolongement dans la continuité et la redynamisation des programmes politiques que j’avais arrêté en 1993 et 1998 et qui furent appréciés lors de mes deux premiers mandats de président.

Nous avons bien-sûr travaillé leur adaptation au contexte et aux besoins de l’heure tout en tenant compte du binôme aspirations profondes et capacité réelle de notre peuple. C’est cette vision qui promeut l’essor de la Centrafrique et des Centrafricains que je m’en irai proposer à mes compatriotes.

Parmi vos deux principaux rivaux, le président sortant François Bozizé et Martin Ziguélé du Mlpc, quel est le plus sérieux pour la Présidentielle 2010?

Ce sera au peuple de juger qui de Martin Ziguélé ou de François Bozizé pourra venir après Patassé. Car je continue à le clamer, je constitue le choix du peuple. Je respecte bien mes concurrents, qui ont chacun un programme, quelles qu’en soient les limites, qu’ils proposeront au peuple. Et ce sera au peuple souverain de juger en toute liberté et transparence qui a la capacité de porter son destin et celui de ce pays. C’est ce que je peux faire pour mon pays qui m’intéresse et non qui entre Ziguélé et Bozizé est le plus coriace.

Et si vous aviez à faire un choix pour le deuxième tour?
Qui vous dit que j’irai au deuxième tour? Moi je vais gagner au premier tour. C’est ça que le peuple centrafricain attend de moi.

Quel rapport entretenez-vous avec vos anciens homologues de la sous région, Idriss Deby Itno du Tchad, Dénis Sassou Nguesso du Congo, Théodoro Obiang Nguema de la Guinée Equatoriale et le Camerounais Paul Biya?

J’ai de très bons rapports avec les chefs d’Etat d’Afrique centrale et même dans tout le continent et à travers le monde entier : en Europe, en Amérique, en Asie, dans le monde arabe. J’entretiens avec certains d’entre eux des relations d’estime et d’amitié de longue date. La plupart d’entre eux ont d’ailleurs fortement contribué à mon retour en Centrafrique. Il vous souvient qu’à l’occasion du dialogue politique inclusif de décembre 2008 en Centrafrique, ce sont des chefs d’Etat amis, parmi lesquels feu le président Omar Bongo Ondimba, mon grand frère, qui avaient tenu à ce que je revienne à Bangui pour y prendre part.

Il y a jusqu’aux organisations interétatiques à l’instar de l’Union africaine, l’Union européenne, et même la Francophonie qui s’étaient impliquées pour mon retour au pays. C’était le défi de tous les chefs d’Etat, en premier lieu du Guide libyen, mon frère Mouammar Kadhafi. Je rends hommage à tous ces chefs d’Etat et à tous ces pays amis pour cette solidarité agissante vis-à-vis de moi et du peuple centrafricain. J’ai voulu le dire de vive voix aux chefs d’Etat de la Cemac lors du sommet de Bangui, mais les programmes surchargés des uns et des autres et même de ces assises, ne nous ont pas été favorables.

Avez-vous toujours l’impression d’avoir été lâché par vos pairs d’Afrique centrale lors du coup d’Etat du 15 mars 2003, notamment par votre « frère »Paul Biya, contre qui vous seriez très remonté?

Je vous dis avec grande satisfaction que c’est un contingent de l’armée camerounaise qui assure ma sécurité ici à Bangui. C’est tout dire de la qualité des relations qui existent entre mon frère, le président Paul Biya et moi, entre le Cameroun et moi en particulier, entre le Cameroun et mon pays, la République centrafricaine. Le Cameroun œuvre activement dans le cadre du Copax pour la paix en Centrafrique. Il faut plutôt remercier mon frère, le président Paul Biya et le gouvernement camerounais tout entier.

Il faut dire avec fermeté que le passé, c’est le passé ! Rappelez-vous qu’en 2003, l’ambassade du Cameroun à Bangui fut encerclée par les rebelles de François Bozizé, et là c’est des choses qu’on ne dit pas. Nous entendons œuvrer pour une redynamisation des relations entre le Cameroun et mon pays dans tous les secteurs. Tournons-nous résolument vers l’avenir afin de bâtir notre Afrique centrale, qui accuse déjà un grand retard par rapport à d’autres sous-régions africaines.

Justement parlant de vos relations avec le Cameroun, vous avez sollicité la médiation du président camerounais Paul Biya dans le litige qui vous oppose au groupe Fotso. Vous accusez la multinationale camerounaise, propriétaire de la Cbca (Commercial Bank Centrafrique), d’avoir détourné vos fonds déposés dans cette banque. Comment cela a-t-il pu se produire?

De prime abord, je voudrais apporter une précision: les relations entre mon pays et le Cameroun sont des relations entre Etats, les relations entre mon frère Paul Biya et moi sont des relations à la fois d’Etat et personnelles. Les relations entre monsieur Patassé, homme d’affaires et monsieur Fotso, homme d’affaires camerounais sont des relations d’affaires, dont des relations privées, qu’il ne faut pas confondre avec les relations qui lient nos deux pays. Ce n’est donc pas une affaire d’Etats.

Nous sommes curieux de savoir ce qui s’est réellement passé ?

C’est une affaire de confiance. Moi j’avais fait confiance au groupe Fotso. Alors que la Centrafrique était frappée par une crise pétrolière, j’étais venu à Yaoundé en janvier 2001 dans le cadre du sommet France-Afrique. Et c’est là que j’avais demandé à mon frère le président Paul Biya de nous aider par rapport à la grave crise de pétrole consécutive à la privatisation de Total Centrafrique. Il fallait trouver des solutions immédiates pour pallier la pénurie de carburant dans le pays.

Et c’est comme ça que le président Biya avait demandé au Premier ministre camerounais d’alors, Peter Mafany Musonge, de m’aider dans cette entreprise. Le Premier ministre avait à son tour saisi le ministre de l’Energie et des Mines avec lequel j’avais engagé des concertations. Ce après quoi, il fallait que je trouve un banquier sérieux au Cameroun. C’est comme cela que j’ai pu avoir contact avec le groupe Fotso. Effectivement, les Fotso m’ont accordé un crédit pour l’achat du carburant à la raffinerie du Cameroun, la Sonara. Depuis lors, nous avons noué des relations d’affaires très poussées avec le groupe Fotso. Et il a fallu que les évènements de 2003 surviennent pour que les Fotso se rangent derrière François Bozize pour détourner mon argent logé dans les comptes de la Cbca.

On n’y croirait pas, tellement vous entreteniez des rapports étroits avec la famille Fotso.

La balle est dans le camp de la famille Fotso. Je leur ai tendu une main fraternelle qu’ils ont refusé de saisir. Nous n’en sérions pas arrivés là s’ils m’avaient écouté, s’ils avaient eu une attitude conciliante à mon égard. D’ailleurs, c’est dans la même logique de trouver une solution à l’amiable que j’ai sollicité la médiation de mon frère le président Paul Biya. Je tiens à préciser que ce problème n’a rien à voir avec les excellentes relations que j’entretiens avec le Cameroun et que le Cameroun entretient avec mon pays. C’est un dossier qui engage deux individus et les relations d’affaires sont du domaine privé.

Quel est le montant global de l’argent que vous réclamez au Groupe Fotso?

Soyons sérieux, avec un peu plus de recul, ce sera prématuré d’avancer un chiffre exact maintenant.

Mais l’un de vos proches nous confiait encore il y a peu que le montant de « l’argent détourné par le groupe Fotso est évalué à 5 milliards de Fcfa auxquels il faut greffer des intérêts de l’ordre de 5 milliards de Fcfa. Ce qui porte vos réclamations à 10 milliards de Fcfa »…

(Rires) Comme ça peut aller au-delà. Je sais que certains montants ont circulé dans la presse. Vous autres, journalistes, aimez bien souvent dire ce qui vous plaît. Mais c’est moi qui vous le dis, aujourd’hui que la justice centrafricaine a tranché que tous mes biens confisqués ou volés me soient restitués, indépendamment de la procédure relative à cette malheureuse affaire, une commission sera mise sur pied par mon groupe d’avocats et le groupe Fotso à l’effet de procéder à une évaluation exacte de tous mes avoirs détournés.

La Cbca botte en touche en déclarant que vos comptes sont bloqués (depuis novembre 2008) par les autorités judiciaires de la Centrafrique et qu’ils sont par ailleurs débiteurs. Autrement dit c’est vous qui leur devez l’argent à la Cbca. Qu’en dites-vous?

Je fais confiance à la justice de mon pays et surtout à mon frère le président Paul Biya dont j’ai par ailleurs sollicité la médiation dans cette affaire. Je ne voudrais pas m’engouffrer dans la même logique que ceux qui tiennent ce type de discours qui tend à brouiller l’opinion. Après cette malencontreuse sortie, mes avocats, Me Zoumalde et Me Aristide Sokambi du barreau de Bangui, ont aussitôt saisi les responsables de la Cbca. Résultat, une commission rogatoire sera mise sur pied pour faire la lumière sur toute cette affaire. Mes comptes qui sont déclarés aujourd’hui débiteurs n’ont été bloqués qu’en novembre 2008. Demandez-leur pourquoi avoir attendu, après le coup d’Etat de mars 2003, cinq bonnes années pour bloquer mes comptes si ce n’était pour les vider.

Trouvez-vous anormal que l’on puisse vous demander l’origine de cette fortune. N’est-ce pas de l’argent public?

Patassé n’est pas un voleur ni un escroc. Patassé est un ingénieur, qui a su créer des outils de production de richesses sans parler des nombreux emplois. Patassé est un homme d’affaires qui ne s’en cache pas, qui développe des projets viables, productifs. Il y a de quoi s’être fait de l’argent. Le secteur pétrolier n’est qu’une infime partie des secteurs d’affaires dans lesquels je m’investi. Patassé, pour avoir aujourd’hui été acquitté par la justice de son pays dans l’accusation de détournement de la fortune publique, attend plutôt de recouvrer son propre argent auprès de l’Etat centrafricain. Voilà la vérité. Renseignez-vous, il est arrivé des moments difficiles pendant lesquels, en accord avec la banque mondiale, c’est moi qui, sur fonds propres, venais au secours de l’Etat pour payer les fonctionnaires.

A votre demande, la milice du Congolais Jean Pierre Mbemba, le Mouvement de Libération du Congo(Mlc) est venu appuyer l’armée centrafricaine contre la rébellion du général François Bozizé. Il est aujourd’hui détenu à la Cour internationale de justice de la Haye pour meurtres, viols et pillages commis par ses hommes en Centrafrique. Vos détracteurs vous prédisent le même sort. N’en perdez-vous pas le sommeil?

Il ne faut pas jouer avec le pouvoir judiciaire. Cette affaire est pendante à la Cour pénale internationale. En attendant, ce sont les avocats qui travaillent sur cette affaire et pourront apporter leur éclairage le cas échéant. Je vous dis encore et une fois pour toute que Patassé n’a aucun dossier devant la Cpi. Ceux qui ont engagé cette affaire, ce sont eux qui auront à répondre devant la Cour pénale internationale. Je respecte ces institutions, je n’ai pas de dossier là-bas, voilà la vérité. Pourquoi voulez-vous que Patassé s’exprime dessus?

Que diriez-vous aux Centrafricains en ce début d’année?

Pas seulement au peuple centrafricain mais à tous les Africains dont la plupart des Etats célèbrent en cette année 2010 le cinquantenaire de leurs indépendances. Il faut que l’Afrique se réveille. Je lance un appel aux peuples d’Afrique d’aller résolument vers l’intégration totale de notre continent, en barrant la voie aux démons de la division, en brisant les barrières du chauvinisme régional.

© Hebdomadaire Repères : Entretien avec Marie Robert ELOUNDOU

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